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Astuces et conseils fiscaux pour vos biens à l’étranger

  • 28 août 2024

Vous rêvez d'acheter une propriété à l'étranger pour y passer des vacances en toute sérénité ? Vous n’êtes pas le/la seul(e). De nombreux Belges optent pour une seconde résidence au soleil, mais l’achat d’un bien immobilier à l'étranger comporte également son lot de risques et de défis.

C’est bien connu, le Belge a une brique dans le ventre. Or, cette brique ne se trouve pas nécessairement dans notre petit pays pluvieux. Vous avez peut-être repéré un joli mas en Provence ou un bien à l’abri des regards dans les collines toscanes lors de votre passage dans le Sud cet été, et vous aimeriez y passer vos prochaines vacances. Prenez votre temps et renseignez-vous bien sur les implications juridiques et fiscales de cet achat. Voici quelques éléments à prendre en considération.

S’établir à l’étranger ou pas ?

Demandez-vous d’abord si vous souhaitez ou non vous installer définitivement à l'étranger. Cette décision n'aura pas que des conséquences familiales, elle peut aussi avoir un impact considérable sur le plan fiscal. Si vous vous installez à l’étranger, vous serez soumis à l’impôt sur le revenu de votre nouveau pays de résidence, qui varie en fonction des lois et coutumes locales en la matière. En cas de décès, les répercussions peuvent également être importantes. Dès que plusieurs États membres de l’Union européenne sont concernés par une même succession1, le règlement successoral européen2 prévoit comme principe de base3 que l’ensemble des biens de la succession (c'est-à-dire tous les biens mobiliers et immobiliers) seront recueillis conformément aux lois de l’État où le défunt avait sa dernière résidence habituelle au moment de son décès. Par exemple, si vous achetez une maison de vacances au Portugal et que vous habitez en Belgique le reste de l’année, votre bien portugais sera, en principe, réparti entre vos héritiers selon les règles du droit successoral belge. En revanche, si vous vous installez au Portugal et que votre maison de vacances devient de facto votre résidence principale, l'ensemble de votre succession (y compris les biens que vous laissez en Belgique) sera, en principe, transmis selon les règles du droit successoral portugais. Sachez aussi que dans certains pays, les enfants n’ont pas le statut d’héritiers réservataires (par exemple au Royaume-Uni). S’établir à l’étranger peut donc avoir des répercussions importantes.

Mais attention, nous parlons d'un véritable déménagement à l'étranger. Il faut, dans la mesure du possible, rompre tous vos liens avec la Belgique en vous faisant radier du registre de la population de votre commune4 et en transférant votre domicile5 à l'étranger. En pratique, nous constatons que les autorités fiscales belges ne se contentent pas toujours d’une simple radiation du registre de la population lorsqu'elles ont des raisons de soupçonner que vous résidez de facto en Belgique de manière plus que régulière. Il existe aujourd'hui, bien plus que par le passé, de nombreux moyens pour démontrer où vous vivez réellement. Songez par exemple aux messages et aux photos que vous publiez sur les réseaux sociaux, comme Facebook ou Instagram. Le fisc peut y jeter un coup d’œil. Dans certains cas, il peut même demander l’accès aux données de vos abonnements mobiles pour vérifier si vous résidez en Belgique ou ailleurs. Si vous n’êtes pas d’accord avec la décision du fisc, c’est le tribunal qui devra trancher. Il s’agit d’une question de fait. Nous constatons également que certaines personnes reviennent en Belgique à un moment donné, parce qu’elles souhaitent passer leurs derniers jours près de leur famille et de leurs amis.

[1]Par exemple, si vous habitez en Belgique et avez une seconde résidence dans un autre pays européen.

[2]Ce règlement s'applique à tous les pays de l'Union européenne, à l'exception du Danemark et de l'Irlande.

[3]Vous pouvez déroger à ce principe de base en rédigeant un testament dans lequel vous stipulez expressément vouloir régler votre succession selon la loi de l'État dont vous possédez la nationalité au moment où vous faites ce choix ou au moment de votre décès. Ce choix s'applique alors à l'ensemble de votre succession.

[4]Jusqu’à preuve du contraire, l'inscription au registre de la population suppose que vous avez établi votre résidence ou le siège de votre fortune en Belgique.

[5]Le domicile fiscal peut être défini comme étant le lieu où une personne réside de façon permanente, où elle installe sa famille et entretient des relations vitales avec ses semblables, ou encore, le lieu où le défunt avait son foyer, sa famille, sa maison, le centre de ses intérêts privés, le siège et le lieu de ses activités professionnelles.

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Et si vous restez en Belgique ?

Même si vous décidez d'utiliser votre seconde résidence uniquement pour les vacances ou comme bien locatif (en d'autres termes, vous conservez votre domicile fiscal en Belgique), vous n’échapperez pas pour autant à certaines obligations fiscales. Vous devrez en effet vous acquitter d’impôts à l'étranger6 : des droits d'enregistrement (ou TVA) lors de l'achat, l’impôt sur les revenus (annuels), un éventuel impôt sur la fortune et, dans certains cas, une taxe sur les plus-values en cas de vente ultérieure ou de donation à vos enfants. Si vous êtes encore propriétaire du bien au moment de votre décès, il ne faut pas oublier les droits de succession7.

Droits d'enregistrement ou TVA à l'achat

Tout comme pour un achat en Belgique, l'achat d'un bien immobilier à l'étranger est soumis au paiement de droits d'enregistrement. Les taux peuvent varier d'un pays à l'autre et parfois même d'une région à l'autre. Dans certains cas, la TVA est (également) due lors de l'achat d'une nouvelle construction. Par contre, l'achat d'un bien immobilier à l'étranger ne doit pas être enregistré en Belgique8.

Impôt sur le revenu, impôt sur la fortune et autres impôts liés à la détention d'un bien immobilier à l'étranger

En tant que propriétaire d'un bien immobilier, vous êtes tenu(e) de payer des impôts chaque année sur ce bien, même si vous ne le louez pas à des tiers et ne l'occupez personnellement que quelques jours ou semaines par an. La règle selon laquelle les revenus9 de biens immobiliers sont imposables s’applique également à l’étranger.  Les taux d’imposition et les éventuelles réductions varient d'un pays à l'autre. Outre les impôts nationaux ou fédéraux, vous devrez souvent aussi payer des taxes régionales et locales (communales) sur ces biens immobiliers et, là encore, les taux varient d'une commune à l'autre. 

Même si vous payez déjà des impôts dans le pays où se situe le bien, n’oubliez pas de déclarer ces revenus dans votre déclaration à l'impôt des personnes physiques en Belgique. En effet, tant que vous résidez en Belgique, vous y êtes imposable sur votre revenu mondial, y compris les revenus de vos actifs à l’étranger. Lorsque vous achetez un bien à l’étranger, vous êtes obligé(e) de le déclarer spontanément dans les quatre mois à l'Administration générale de la documentation patrimoniale en Belgique. Vous pouvez le faire en ligne via MyMinfin ou par courrier. Le fisc belge attribuera alors un revenu cadastral (RC) à votre bien immobilier. Vous aurez besoin de ce RC pour remplir votre déclaration fiscale belge. Serez-vous dès lors effectivement imposé(e) en Belgique sur votre résidence secondaire à l'étranger ? La réponse n’est pas si simple. La Belgique a conclu des conventions avec la plupart des pays afin d’éviter une double imposition. Celles-ci attribuent généralement le pouvoir d'imposition des revenus immobiliers au pays où se situe le bien. Pour déterminer si et comment ces revenus seront imposés, il convient de consulter la législation du pays concerné. L'une des conséquences de ces conventions est que le fisc belge n’est alors plus autorisé à imposer ces revenus. Il s'agit toutefois d'une exonération « sous réserve de progressivité ». Selon cette disposition, le fisc belge peut néanmoins tenir compte de ces revenus immobiliers pour déterminer les taux d'imposition applicables à vos autres revenus imposables en Belgique10. Par cet effet de progressivité, vos revenus belges pourraient être soumis à des taux d'imposition plus élevés. Nous vous invitons à consulter notre article précédent intitulé « Bien immobilier à l’étranger : pleins feux sur la fiscalité », publié le 20 octobre 2021.

Taxation des plus-values en cas de vente

En Belgique, les plus-values réalisées lors de la vente d'un bien immobilier sont généralement exonérées d’impôt. Ce n’est cependant pas toujours le cas à l’étranger, ou alors sous certaines conditions. En France et en Espagne, il existe par exemple une taxe sur les plus-values lors de la vente de biens immobiliers. Il est donc important de se référer aux dispositions de la convention de double imposition pour en savoir davantage. Ces conventions attribuent généralement le pouvoir d'imposition sur les plus-values réalisées lors de la vente de biens immobiliers au pays où se situe le bien.


Droit successoral et droits de succession en cas de décès

Lors du décès du propriétaire, les biens immobiliers situés à l'étranger requièrent une attention particulière. Il convient d’abord de déterminer le droit applicable. Comme mentionné plus haut, ce n’est pas nécessairement le droit successoral belge qui s’applique. Ensuite, il y a le volet fiscal. Vos héritiers devront payer des droits de succession sur votre maison de vacances dans le pays où elle se situe11 mais également en Belgique, si vous y résidez au moment de votre décès12. Ils risquent donc de payer deux fois des droits de succession sur le même bien. Idéalement, une convention entre la Belgique et le pays concerné devrait déterminer, à l’instar des impôts directs, le pays compétent pour percevoir les droits de succession. La Belgique n’a cependant conclu une telle convention visant à éviter la double imposition qu’avec la France et la Suède. Il y est stipulé que seul le pays dans lequel se situe le bien immobilier est autorisé à percevoir des droits de succession. Ainsi, si vous possédez une maison de vacances en France, seul ce pays sera autorisé à prélever des droits de succession sur ce bien. Toutefois, si vous résidez en Belgique au moment de votre décès, vos héritiers devront mentionner votre résidence en France dans la déclaration de succession en Belgique. Néanmoins, conformément aux dispositions de la convention, l'administration fiscale belge devra accorder une réduction équivalente au montant des droits de succession effectivement payés en France sur les droits de succession dus en Belgique sur ce bien. En revanche, si le pays où se situe votre seconde résidence n’a pas conclu de convention avec la Belgique visant à éviter la double imposition, le droit interne belge prévoit une disposition pour réduire la double imposition : les droits de succession payés à l'étranger sur votre seconde résidence peuvent être déduits des droits de succession dus en Belgique sur ce bien13. Pour bénéficier de cette réduction, plusieurs conditions doivent être remplies et vos héritiers devront fournir plusieurs documents14 à l’administration fiscale belge.

[6]Et parfois même en Belgique.

[7]Même si les termes « impôt sur la donation et la succession » sont uniquement utilisés en Région flamande (et que nous parlons de « droits de donation et de succession » en Région de Bruxelles-Capitale et en Région wallonne), nous utiliserons de façon uniforme les termes « droits de donation et de succession » pour faciliter la lecture de ce texte.

[8]Si vous souhaitez néanmoins faire enregistrer l'acte d'achat en Belgique, vous ne paierez que le droit fixe de 50 euros.

[9]Que le bien soit loué ou utilisé à des fins personnelles.

[10] Par exemple, les autres revenus immobiliers de biens situés en Belgique, les revenus professionnels...

[11] À moins que ce pays ne prélève pas de droits de succession.

[12] Si vous résidez en Belgique au moment de votre décès, vos héritiers seront redevables des droits de succession belges sur l’ensemble de votre patrimoine mondial, y compris sur votre résidence située à l'étranger. 

[13] Cette déduction ne peut excéder le montant des droits de succession qui auraient été dus en Belgique pour ce bien.

[14] Une copie certifiée conforme de la déclaration de succession à l'étranger, du calcul des droits à payer à l'étranger et une quittance datée des droits de succession payés à l'étranger.

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Planification successorale 

L'achat d'une propriété à l'étranger est le moment idéal pour réfléchir à la planification de votre succession. Vous pouvez évidemment acheter vous-même la maison de vos rêves, puis en faire donation à vos enfants de votre vivant. En Belgique, vous ne paierez pas de droits de donation, mais vous devrez peut-être les payer dans le pays où se situe le bien. Il peut donc s’avérer utile d’impliquer vos enfants dès l'achat du bien, par exemple par le biais d'un achat scindé. Dans ce cas, vous conservez l'usufruit15 du bien, tandis que vos enfants en acquièrent la nue-propriété16. L'achat scindé fonctionne dans de nombreux pays, dont la France et l'Italie17, selon des principes similaires à ceux en vigueur en Belgique, mais ce n’est pas le cas partout. Par exemple, en Espagne, le nu-propriétaire doit encore payer des droits d'enregistrement au décès de l'usufruitier. Une donation serait alors plus indiquée. Comme vous pouvez le constater, chaque pays a ses propres techniques de planification. Il est donc toujours conseillé de consulter un spécialiste en la matière sur place.

Quelques conseils pratiques...

Ne cédez pas à l’achat impulsif

Vous avez peut-être visité la maison de vos rêves au moment idéal : pendant la haute saison touristique, quand il fait beau, que de nombreuses activités sont organisées pour les touristes et que le prix des locations est élevé (ce qui peut séduire ceux qui envisagent de louer cette maison de vacances). Cependant, la réalité peut être très différente en basse saison. Prenez le temps d'explorer les environs ou la région à votre aise, également en dehors de la saison touristique. L’endroit peut sembler tout à fait différent, ce qui aura peut-être un impact sur le prix demandé.

Usage personnel ou location ?

Certains pays imposent des restrictions aux étrangers qui souhaitent y acheter une propriété. En Suisse, par exemple, des conditions et restrictions strictes s’appliquent lors de l'achat de biens immobiliers par des non-résidents. N'oubliez pas non plus que certaines régions et communes peuvent imposer des restrictions à ceux qui souhaitent louer leur propriété ou l’utiliser à des fins touristiques (par exemple, via Airbnb). Si vous envisagez de louer votre bien à l'étranger (même pour une partie de l'année), il est fortement recommandé de vérifier à l'avance si c’est autorisé et quelles sont les conditions applicables.

N'oubliez pas les coûts indirects et récurrents

Lors de l’achat d'un bien, il est naturel de penser principalement au prix d'achat à verser au vendeur. Cependant, pour éviter les mauvaises surprises financières, il est essentiel de prendre en compte les autres coûts liés à l’achat de votre maison de vacances, notamment les frais de parties tierces (agent immobilier, avocat, notaire, etc.), les droits de mutation, les éventuels travaux de rénovation ou de remise en état, ainsi que les coûts annuels récurrents, tels que les impôts, les assurances, les frais d'entretien, l'utilisation des services publics (eau, gaz, électricité, ramassage des déchets) et les éventuels frais pour les charges communes si le bien que vous achetez fait partie d’un parc récréatif. S’ajoutent également les coûts liés aux déplacements, tels que les péages et les billets de train ou d'avion.

Le rôle du notaire étranger est parfois limité

Le rôle du notaire à l'étranger n’est pas toujours le même qu’en Belgique. Dans certains pays, dont l'Espagne et l'Italie, l'intervention d'un notaire se limite souvent à la signature de l'acte d'achat. Il est donc recommandé de faire appel à un avocat spécialisé qui vérifiera entre autres l’identité du propriétaire, la validité des permis, l’existence des dettes et/ou servitudes éventuelles grevant la propriété et les formalités que vous devez accomplir.

[15] Vous pouvez alors habiter le bien acheté ou le louer et percevoir les revenus locatifs.

[16] Que ce soit ou non avec des fonds que vous leur avez donnés avant l'achat.

[17] Étant donné la quasi-absence de droits de donation en Italie, la nue-propriété peut également faire l'objet d'une donation ultérieure.

Conclusion

Investir dans l'immobilier peut être une excellente idée. En achetant un bien à l'étranger, vous profiterez d'un climat ensoleillé, de la quiétude de la campagne ou du charme d'un cadre historique. Cependant, il est important de ne pas se laisser guider uniquement par ses émotions et de bien prendre en compte les implications juridiques et fiscales. Il est vivement conseillé de consulter des spécialistes sur place pour vous accompagner dans cette démarche. Ils vous aideront à éviter des retards, d'éventuels litiges et peut-être la perte de vos droits de propriété. Comme le dit l’adage : un homme averti en vaut deux.

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